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Subtil parcours

Publié le par Bullomaniak

Tour de l'Ain 2013

La Route du Sud et le tour de l'Ain constituent à mes yeux deux des trois plus belles courses par étapes de France. Le Dauphiné ayant lui droit à une diffusion télévisée, il m'est toujours aussi révoltant de constater le mépris de France Télévision envers ces deux épreuves. La Route du Sud constitue en quelque sorte un événement confidentiel au sein du calendrier cycliste français ; l'oubli apparaît plus naturel. Le Tour de l'Ain par contre jouit d'une belle renommée. La liste des vainqueurs est suffisamment éloquente : Zubeldia, Talansky, Moncoutié, Gadret... Tous ont fini dans le top 10 d'un grand tour, certains dans un top 5. Le tour de l'Ain parle surtout aux coureurs français ; cela n'empêche pas une belle participation de coureurs étrangers, la venue d'équipes de premier plan.

Cette année les organisateurs se surpassèrent. Le parcours se voulut progressif, renforçant jour après jour les difficultés. La course débuta par un prologue au bord de la Saône. La deuxième journée fut destinée aux sprinteurs. La troisième aussi, si ce n'est qu'une difficulté créa la sélection, n'épargnant qu'une quarantaine d'unités. La quatrième journée fut celle des grimpeurs-puncheurs, profitant des premiers enchaînements de cols pour créer une sélection en vue du général. Le dernier jour était celui de montagne, les coureurs escaladant le flanc de l'ardu Grand Colombier. Chacun dans ce système y trouva sa part : chaque type de coureur disposait d'une unique occasion de victoire d'étape. Le général devait se tracer naturellement en montagne. Au final peu d'épreuves par étapes se jouent en montagne. La plupart des courses se sentent obligées d'imposer un contre-la-montre, réduisant à néant les espoirs de certains. L'accumulation des difficultés créa un suspens magnifique ; au soir de la quatrième étapes, seuls huit coureurs pouvaient prétendre encore à la victoire. Le Grand Colombier fut parfaitement respecté, jouant son rôle d'ultime arbitre de la course. Ce fut même mieux. L'arrivée fut tracée vingt kilomètres après la descente du col. Les favoris s'écharpèrent une demi-heure encore, créant de nouveaux faits de courses, chamboulant plus encore le classement général dans les derniers contreforts de l'étape, préservant le suspens jusqu'au bout.

L'absence de diffusion me conduisit à suivre la course différemment. L'absence d'images empêche de constater la force réelle des coureurs, les oppositions, les dominations, surtout de comprendre le fonctionnement intime de l'épreuve. Un direct écrit gagne certainement en suspens et alimente l'imagination ; néanmoins c'est la frustration qui l'emporte. La course fut belle ; les attaques fusèrent, les favoris s'écharpant loin des arrivées, refusant d'attendre les ultimes difficultés. Dans notre époque où la diffusion de course insipides est récurrente, perdre la possibilité d'admirer de telles choses me désespère. Ma période favorite de la saison va de Paris-Nice au Giro, là où les classiques de Printemps s'agglomèrent. Seules ces courses dans l'année apparaissent pleinement débridée, le summum étant Paris-Roubaix, seule course où les favoris sont livrés à eux-même à près de cent kilomètres de la ligne. Dans cette période surchargée où finalement les coureurs se contentent de scénarios usuels, la seule course qui les refuse n'est pas accessible au regard. Il devient plus difficile d'apprécier à sa juste valeur la victoire finale de Romain Bardet.

Parmi la jeune génération des coureurs cyclistes, il est un de ceux à qui j'ai immédiatement apporté mon soutient. La raison est simple : Bardet fait parti de cette minorité de coureurs capables d'un sens tactique élaboré couplé d'un parti constant en faveur de l'offensive. Il éclata à mes yeux sur l'Amstel Gold-Race, prouvant sa combativité, sa force, surtout son ambition. Ses deux premières saison le confirmèrent : mentalement Bardet a l'étoffe d'un champion. Première condition respectée : il a du panache. Il a aussi l'ambition, la rage de vaincre, le refus des accessits. Plus que tout il a quelque chose d'inégalable, la possibilité de créer des faits de course, de déclencher les hostilités. Sa présence apporte un intérêt supplémentaire à la course. La chose n'est pas encore réellement valable sur les grands événements. Ce n'est qu'une question de temps. Sa quinzième place sur le Tour n'a confirmé en rien ses qualités ; elle a surtout montré ses capacités de récupération. Plus qu'un rôle à jouer sur les grands tour, ce dont il ne sera sans doute jamais pleinement capable, c'est sa capacité à s'entraîner qui en ressort grandie. Plus on récupère vite, plus on peut s'entraîner, et s'améliorer d'autant plus. En toute logique l'année prochaine verra ses premières interventions d'importance sur les Ardennaises.

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